Le carcinome hépatocellulaire (CHC) est la pathologie tumorale la plus répandue qui touche au foie dans le monde. Cette affection est responsable de 500 000 à 1 million de décès par an à travers le monde. En France, d’après les chiffres de la société française d’hépatologie, c’est près de 8 000 cas de décès qui peuvent être imputés à cette pathologie cancéreuse chaque année. Le taux de survie à 5 ans est assez réduit (de 15 %) dans les cas de diagnostic tardif. Bien heureusement, l’imagerie médicale associée à la médecine classique et à la médecine nucléaire permet de diagnostiquer précocement le carcinome hépatocellulaire et de le juguler sans perdre de temps.
Qu’est-ce que le carcinome hépatocellulaire ?
Le carcinome hépatocellulaire (CHC) est une forme de cancer qui affecte le foie. Il est aujourd’hui l’une des pathologies tumorales les plus fréquentes avec son incidence à travers le monde qui connaît une réelle augmentation. La pathologie se développe le plus souvent sur une hépatopathie sous-jacente, généralement la cirrhose de foie, rarement à cause d’une hépatite B virale. Mais, elle peut également apparaître exceptionnellement sur un foie sain, en raison de la localisation secondaire de cellules cancéreuses provenant d’un autre organe comme le côlon.
Le carcinome hépatocellulaire, encore appelé cancer du foie, fait partie des affections tumorales dites muettes. Son développement chez un patient se fait de façon silencieuse, sans l’apparition de symptômes annonciateurs. Les premiers signes cliniques apparaissent chez les patients à un stade avancé. Il s’agit essentiellement de la fatigue et des troubles digestifs. Mais, pour se prononcer en faveur d’un carcinome hépatocellulaire, certains signes spécifiques doivent être rencontrés chez le patient, notamment :
- La sensation d’une masse dans la région hépatique, située en dessous des côtes dans l’hypocondre droit ;
- Confusion et tremblote qui se manifestent en présence d’une cirrhose de stade avancé ;
- Les troubles digestifs (anorexie, nausées) ;
- Ictère (jaunisse) se manifestant par un jaunissement du blanc des yeux et de la peau ;
- Ascite, épanchement liquidien du péritoine qui remplit le ventre et augmente son volume.
Ces signes attirent très souvent l’attention sur la présence d’un cancer du foie. Mais, ils doivent être associés à un diagnostic précis posé par des analyses biologiques et quelques examens en imagerie médicale.
Comment se fait le diagnostic d’un cancer du foie ?
Différents examens doivent être réalisés pour poser efficacement le diagnostic d’un carcinome hépatocellulaire. Ce sont généralement des tests biologiques, mais également quelques explorations d’imagerie médicale qui permettent de voir et de décrire la présence d’une potentielle tumeur hépatique.
Le bilan hépatique
Il s’agit d’un ensemble de tests de la fonction hépatique qui sont prescrits au patient présentant des symptômes d’un cancer du foie. Ils ne permettent pas réellement de diagnostiquer la présence d’une tumeur. Mais, en les prescrivant, le médecin peut s’assurer d’un dysfonctionnement du foie. Ces analyses biochimiques sanguines regroupent entre autres :
- Le taux d’albumine, une protéine sécrétée par le foie et dont la baisse dans le sang peut être évocatrice ;
- L’alanine aminotransférase (ALT) : le taux de cette enzyme détectée dans le foie et les reins évolue à la hausse avant l’apparition des symptômes d’un carcinome hépatocellulaire ;
- La bilirubine issue de la désintégration des globules rouges défectueux et dont la hausse dans le sang entraîne la jaunisse due à un dysfonctionnement du foie ;
- La phosphatase alcaline (PA) : enzyme détectée dans le foie et d’autres organes, et dont le taux élevé signale un trouble hépatique ;
- L’aspartate transaminase qui libère le sérum glutamo-oxaloacétique transaminase (SGOT) en présence d’une pathologie du cœur ou du foie.
En plus de ces diverses analyses, le médecin peut également prescrire le temps de Quick, ou temps de prothrombine (TP). Ce test est effectué pour déterminer le temps nécessaire à la coagulation du sang. Le foie sécrète en effet des protéines qui participent à la coagulation du sang. Au vu des observations, un temps de coagulation long peut être le signe d’une pathologie hépatique. Toutes ces analyses biochimiques sont accompagnées d’une formule sanguine complète (FSC), examen qui permet d’étudier la quantité et la qualité des constituants du sang (globules blancs, rouges et plaquettes sanguines).
Le dépistage de l’hépatite
En présence des signes caractéristiques d’une tumeur hépatique, les professionnels de santé prescrivent généralement un test d’hépatite au patient. Celui-ci permet de savoir s’il s’agit d’un carcinome hépatocellulaire primaire d’origine virale attesté par une infection chronique au virus de l’hépatite B (VHB), de l’hépatite C (VHC) ou aux deux. Dans le cas contraire, des causes secondaires seront recherchées pour comprendre l’origine de la pathologie.
Le dosage des marqueurs tumoraux
Ce sont des substances présentes normalement dans le sang, les tissus et autres constituants de l’organisme. Mais, leur augmentation peut signifier le développement d’une tumeur. Autrefois, pour diagnostiquer le carcinome hépatocellulaire, les médecins prescrivaient le plus souvent l’alpha-fœtoprotéine (AFP). De récentes recherches prouvent néanmoins que le taux de cette protéine peut également augmenter en présence d’un cancer des canaux biliaires intrahépatiques. Alors, l’AFP n’est plus depuis considérée comme une référence diagnostique du CHC.
L’échographie abdominale
Encore appelée sonographie, il s’agit d’un examen d’imagerie médicale qui se sert des ultrasons pour explorer l’intérieur du corps humain. Dans le cas des pathologies hépatiques, il permet d’observer le foie, d’étudier sa structure, sa forme et sa taille.
L’échographie peut en outre diagnostiquer les masses développées aux dépens du foie et détecter si elles sont solides ou remplies de liquide. Chez certaines personnes à risque, comme ceux souffrant de la cirrhose de foie, il est bien souvent conseillé de faire cet examen tous les 6 mois. Il s’agit en effet d’un suivi pour identifier au plus vite le développement d’une tumeur et y répondre efficacement.
Le scanner abdominal
Le scanner abdominal est un examen d’imagerie qui permet d’avoir des images en coupe des structures de l’organisme. L’appareil utilise en effet des sources de rayons X couplées à des détecteurs et à un système informatique. Cela lui permet de produire des images en 3D des organes, tissus et vaisseaux du corps.
La TDM dans le cadre du diagnostic d’un cancer de foie se fait en trois phases (acquisition multiphase). Dans un premier temps, des coupes de la région abdominale sont réalisées sans injection de produit de contraste. C’est après cette étape que le patient reçoit l’injection d’une solution iodée, laquelle permet de mieux visualiser les structures abdominales. La diffusion du produit au sein du foie permet déjà de dire s’il y a une tumeur.
Le scanner abdominal est une exploration de qualité qui permet de détecter la tumeur, mais d’avoir aussi les informations sur son emplacement, sa taille et sa structure. Il peut également identifier une propagation des cellules cancéreuses aux structures situées dans la région hépatique. Cet examen est par ailleurs très utile dans les prises de décisions sur le choix de la thérapie face à un carcinome hépatocellulaire.
L’imagerie par résonnance magnétique (IRM)
Il s’agit aussi d’un examen d’imagerie médicale qui produit des images en coupe des structures de l’organisme. L’IRM se sert en effet des ondes de radiofréquence qui interagissent avec les noyaux d’hydrogène au sein de la structure examinée. Cette modalité a la possibilité de diagnostiquer les nodules dans la majorité des cas. Elle peut également aider dans les bilans d’extension aux ganglions lymphatiques, tissus et organes voisins.
Le diagnostic du carcinome hépatocellulaire en médecine nucléaire
Les examens de la médecine nucléaire sont bien souvent prescrits avant une ablation totale ou partielle du foie. Plusieurs explorations peuvent être effectuées à cet effet, notamment :
La scintigraphie hépatique
La scintigraphie hépatique est un examen métabolique qui permet d’étudier le fonctionnement du foie. Elle est réalisée en administrant un produit radioactif qui est la mébrofénine. L’examen est aussi utilisé pour évaluer la fonction résiduelle du foie restant à la suite d’une ablation partielle.
La scintigraphie osseuse
Elle permet d’identifier les localisations secondaires de cellules cancéreuses sur le tissu osseux. La scintigraphie osseuse se déroule en deux phases, la première qui consiste en l’injection du radionucléide, soit du Méthylène Diphosphonate (MDP) ou de l’Hydroxymethylene diphosphonate associé au technétium-99 métastable.
La seconde est l’acquisition des images. Elle se fait 2 h à 3 h après l’injection du produit radioactif. Les scintigraphies hépatique et osseuse peuvent être associées à un scanner low dose qui permet d’avoir plus d’informations sur les zones explorées.
Le Tep-Scan
Cet examen est plus précis et permet d’obtenir des images en 3D des organes du corps avec des détails spécifiques. Il permet aussi d’étudier le fonctionnement de la structure explorée et de ses cellules. Le PET-CT met en évidence la masse, mais aussi les ganglions lymphatiques affectés et les localisations secondaires à distance de la tumeur primaire.
Les examens anatomopathologiques
La biopsie consiste en un prélèvement des tissus hépatiques pour procéder à une analyse en laboratoire. L’échantillon analysé peut mettre en évidence la présence de cellules cancéreuses ou non au niveau du foie. Plusieurs méthodes peuvent être utilisées pour faire des examens anatomopathologiques. Mais, la plus pratiquée est la biopsie par forage.
Quelle thérapie administrer pour un carcinome hépatocellulaire ?
Le choix d’une thérapie pour un patient souffrant d’un cancer du foie peut être plus ou moins complexe. Il doit en effet se faire en tenant compte de plusieurs paramètres, plus précisément :
- Les comorbidités ;
- La fonction hépatique ;
- La localisation de la tumeur, sa taille et sa structure.
Pour choisir la solution la plus adaptée aux besoins du patient, c’est d’ailleurs une réunion de Concertation Pluridisciplinaire (RCP) constituée de médecins et de soignants qui se met en place. Ceux-ci peuvent ainsi choisir parmi les approches de thérapies suivantes pour mieux soulager le patient.
Le traitement par chimioembolisation du carcinome hépatocellulaire
C’est le traitement de première ligne qui est le plus souvent pratiqué chez les patients à un stade intermédiaire du cancer et dont l’état de santé général n’est pas à déplorer. Deux techniques peuvent être utilisées à cet effet, notamment la chimiothérapie conventionnelle (CE) et la chimio-embolisation aux microparticules chargées (mCE).
La chimiothérapie conventionnelle suggère l’injection intracellulaire hyper sélective dans les voies d’irrigation de la tumeur d’un agent chimique cytotoxique. À cela s’ajoute une embolisation, laquelle permet de boucher les voies nourricières de la tumeur. Ce traitement permet de ralentir la progression du cancer du foie, tout en contrôlant ses symptômes.
Le principe de la chimio-embolisation aux microparticules chargées (mCE) est pratiquement le même que celui du CE. Sauf qu’ici, sont utilisées des microsphères calibrées et chargées d’agents cytotoxiques. Calibrées entre 100 et 900 μm, ces microparticules biocompatibles non résorbables entraînent une occlusion durable. Elles sont en outre chargées de la chimiothérapie, dont la libération se fait de façon lente et progressive. Ces deux approches présentent des avantages et inconvénients qui doivent être pris en compte avant leur application sur un patient.
La thérapie par thermoablation pour un cancer du foie
La thermoablation (TA) est une opération qui consiste à brûler la masse tumorale au niveau du foie. Elle se fait à travers l’insertion d’aiguilles au sein des nodules hépatiques. Celles-ci peuvent diffuser une chaleur jusqu’à 110 °C au sein des cellules cancéreuses et donc provoquer leur nécrose. La thermoablation d’un carcinome hépatocellulaire peut se faire par l’utilisation des ondes de radiofréquence ou encore des micro-ondes.
L’électroporation
Cette technique d’ablation non thermique à l’avantage de préserver les structures vasculaires autour de la tumeur, les voies biliaires, mais aussi les tissus conjonctifs. Elle est prisée pour les tumeurs hépatiques présentant des contre-indications à la thermoablation. L’électroporation consiste en effet en l’administration de multiples et brèves impulsions électriques avec un voltage et une intensité élevée. Cela provoque une modification de l’équilibre ionique des cellules cancéreuses avec la perforation de leur membrane, entraînant ainsi une apoptose.
Le traitement du carcinome hépatocellulaire par la radioembolisation transartérielle
Encore appelée radiothérapie sélective interne, cette technique est déployée face à un cancer du foie en stade avancé, mais avec une fonction hépatique conservée. Elle se fait par l’injection de l’yttrium 90 (90 Y). Ce radio-isotope émet en effet des rayonnements bêta à forte dose qui vont bombarder les cellules tumorales et les détruire.
La greffe de foie sain
Après une thérapie pour cancer de foie, les médecins peuvent également procéder à une greffe de foie. Cette option est le plus souvent adoptée chez les patients ayant développé la tumeur sur un foie cirrhotique. La transplantation permet à la fois de répondre au cancer du foie, mais aussi à la maladie chronique qui provoque le dysfonctionnement hépatique.
Quel suivi après le traitement du cancer de foie ?
Le suivi après la thérapie d’un carcinome hépatocellulaire doit être réalisé par un collège d’oncologues, de médecins hépatologues, lesquels associent le médecin de la famille. Chez le patient ayant subi une greffe du foie, les spécialistes de greffe doivent également intervenir pour une meilleure prise en charge. Il est toutefois important de rappeler que le suivi dépend de la nature de la thérapie mise en place :
- Pour une chimioembolisation transartérielle, le patient doit avoir une première visite avec les médecins 4 à 6 semaines après la thérapie, avant de commencer les visites régulières chaque trois mois ;
- Dans le cas d’une ablation par radiofréquence, la première visite se fait 4 semaines après la fin du traitement avant les rendez-vous de chaque 3 à 6 mois sur deux ans, puis tous les 6 à 12 mois ;
- S’agissant d’une radiothérapie métabolique par contre, les visites doivent se faire au moins toutes les 4 semaines, jusqu’à ce que l’état du patient se stabilise.
Lors des visites, le médecin fait des observations sur le patient pour suivre l’évolution de la pathologie et identifier toute récidive. Il palpe ainsi l’abdomen pour vérifier si le foie et la rate gardent leur taille normale, ou s’il y a une ascite. Des examens de la peau permettent également d’identifier un ictère ou encore un œdème au niveau des pieds. Ces observations cliniques sont le plus souvent confortées par des examens d’imagerie médicale ou encore des analyses biologiques qui permettent de mieux étudier la fonction hépatique et l’évolution des cellules hépatiques.
Quelle est la durée de vie d’une personne atteinte du cancer du foie ?
Les scientifiques définissent le plus souvent une survie médiane qui est calculée en mois ou en années. Celle-ci correspond à la période qui suit le diagnostic de la pathologie ou le début du traitement au bout duquel la moitié des patients affectés par cette pathologie restent toujours en vie. Ainsi, la durée de vie d’une personne atteinte du cancer du foie dépend du stade de la pathologie et de la prise en charge. Un diagnostic précoce peut donc augmenter les chances de survie.
Voici un tableau qui présente la survie à un carcinome hépatocellulaire selon la classification BCLC (Barcelona Clinic Liver Cancer).
Stade BCLC | Durée de vie d’une personne atteinte du cancer du foie |
0 | 80 % à 90 % lorsqu’il s’agit d’une tumeur unique ne mesurant pas plus de 2 cm et traitée par une ablation par radiofréquence ou par une résection du foie. |
A | 50 % à 70 % de chance de survie après 5 ans lorsqu’une thérapie par résection du foie est mise en place avec une greffe de foie. |
B | 16 mois, avec l’espoir d’une survie médiane pouvant aller à 40 mois pour les patients ayant bénéficié d’une chimioembolisation transartérielle (TACE). |
C | 6 à 8 mois en l’absence d’un traitement et 11 à 13 mois lorsqu’un traitement est mis en place. |
D | Entre 3 et 4 mois. |
Sources : https://www.fmcgastro.org/texte-postu/postu-2022/radiologie-interventionnelle-dans-le-carcinome-hepatocellulaire/
https://www.revmed.ch/revue-medicale-suisse/2010/revue-medicale-suisse-233/prise-en-charge-du-carcinome-hepatocellulaire-en-2010
https://cancer.ca/fr/cancer-information/cancer-types/liver/treatment/follow-up# : ~ : text=Si%20vous%20avez%20subi%20une, les%206%20%C3%A0%2012%20mois.
https://www.e-cancer.fr/Patients-et-proches/Les-cancers/Cancer-du-foie/Diagnostic
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